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TYPE DE SUPPORT : ARTICLE   |   CATÉGORIE : DANS LA PRESSE

AUTEUR : Patrick Bignon

DATE : 17 mai 2017

L’ORGANISATION SECTORIELLE, UNE TENDANCE DANS LES CABINETS D’AVOCATS

Répondre à la demande de leurs clients, favoriser la transversalité, rendre plus efficace le développement commercial, font partie des raisons expliquant la tendance à davantage d’organisation sectorielle dans les cabinets d’avocats.

Depuis quelques années, le nombre de cabinets d’avocats d’affaires qui ont adopté une organisation interne sectorielle ne cesse d’augmenter. Cette organisation par secteurs économiques, qui vient s’imbriquer ou se substituer totalement à l’organisation par pratiques juridiques, se traduit sur le marché par deux grandes tendances : l’apparition de cabinets de niche spécialisés sur un secteur plutôt que dans un domaine du droit, et le développement de spécialisations sectorielles très fortes au sein de cabinets pluridisciplinaires. À cette organisation matricielle à double entrée (par secteurs et par domaines du droit) peut également venir se greffer une troisième entrée par zone géographique.

Si les cabinets d’affaires adoptent cette approche sectorielle de leurs marchés, c’est avant tout parce qu’elle répond à une demande de la part des entreprises pour lesquelles la connaissance de leur secteur d’activité est un critère essentiel dans le choix de leurs conseils. Car si la compétence technique des avocats est nécessaire pour les clients, elle n’est pas toujours jugée suffisante. Il ne suffit plus d’être de très bons techniciens du droit, il faut faire preuve d’une expertise appliquée à l’économie du secteur considéré : en connaître les aspects juridiques et réglementaires mais aussi les acteurs, privés et institutionnels, les normes, les codes et les usages… Or, si cette attente des clients est particulièrement forte dans les secteurs régulés (finance/assurance, pharmacie/sciences de la vie, médias/télécoms, énergie, immobilier/construction…), elle s’observe sur un nombre de plus en plus large de domaines, et s’exprime sans ambiguïté dans les appels d’offres. Pour le cabinet d’avocats, la mise en place d’une organisation sectorielle vise alors à satisfaire au mieux les attentes des clients en développant une connaissance transversale qui leur permet de jouer pleinement leur rôle de conseil.

Or, il s’avère qu’au-delà de la nécessité de répondre à la demande du marché, ce type d’organisation interne présente bien d’autres atouts pour les cabinets d’avocats. En premier lieu, l’approche sectorielle facilite le business development car un professionnel, une équipe ou un cabinet est plus facilement identifiable sur le marché s’il est associé à un secteur donné. Une visibilité qu’il est possible d’entretenir et de développer en s’impliquant dans la vie du secteur au sein d’associations ou de cercles informels, en participant aux rencontres et en contribuant aux travaux de réflexion et de prospective, par exemple ; et une visibilité qui peut également s’exprimer dans les médias, dans la mesure où les journalistes en quête de l’avis d’un avocat ont tendance à privilégier l’expert du secteur plutôt que celui du domaine juridique concerné.

Il est également plus facile pour un associé de faire du business development s’il est un spécialiste d’un écosystème dont il connaît tous les acteurs – d’autant plus que, les dirigeants et directeurs juridiques changeant souvent de société au sein d’un même secteur d’activité, son réseau peut s’agrandir automatiquement à chaque mouvement. Il n’est donc pas surprenant de constater que les spécialisations sectorielles sont de plus en plus mises en avant dans les CV des avocats ainsi que dans la présentation de l’offre du cabinet, sur son site Internet et l’ensemble de ses supports de communication. Il n’est toutefois pas question de revendiquer une spécialisation sectorielle dans un seul objectif marketing : celle-ci doit reposer sur une véritable offre commerciale.

Enfin, l’organisation interne sectorielle est un bon moyen pour un cabinet d’avocats de développer le collectif. En cassant les silos entre départements et domaines du droit, elle implique de faire travailler ensemble des équipes de différentes spécialités, encourage le partage de l’expérience et la transversalité de la réflexion, oblige les avocats à formaliser une réponse de façon pluridisciplinaire et les invite à réfléchir collectivement à l’offre du cabinet en fonction des secteurs d’activité ou de chacune des problématiques spécifiques à un secteur.

Bien entendu, cette forme d’organisation interne présente aussi des contraintes. La plus évidente concerne la gestion des conflits d’intérêts dans un secteur donné, en conseil et surtout en contentieux. La plus astreignante est la nécessité de réaliser une solide veille économique aux côtés de la veille juridique. La plus délicate consiste à mesurer le risque lié au fait de circonscrire l’intervention des avocats à un secteur dont l’activité peut connaître une crise. Pour les cabinets pluri-compétences, il existe aussi une contrainte en termes de taille minimum : si la structure ne compte qu’un seul spécialiste d’un domaine du droit, il lui sera difficile d’être un spécialiste de tous les secteurs couverts par ses confrères. Enfin et surtout, la mise en place d’une organisation interne sectorielle doit être en ligne et en cohérence avec la stratégie du cabinet, et ne pas être en total décalage avec sa culture, notamment en ce qui concerne la place du collectif.